dimanche 25 septembre 2011

Séminariste: Une nouvelle vie

JE, lors de la fin de notre dernier entretien, tu venais d’être accepté en Élément A au séminaire, et tu avais décidé d’y aller. Comment ça se passait l’inscription, puis l’installation?

D’abord, t’envoyais la réponse, pour dire que tu y allais. Il restait ensuite à m’organiser, organiser ma valise, une grosse valise, que j’ai encore en bas. Le linge, en fait, et comme j’allais le faire laver là-bas, il fallait qu’il soit étiqueté. La base, c’était un pantalon gris et un blazer bleu marin.

On parle de quel séminaire, celui des pères maristes?

Non. Le séminaire de Chicoutimi, c’étaient pas les pères maristes. C’était le séminaire diocésain. C’étaient des prêtres du diocèse, et non pas des pères.

Chez vous, vous n’étiez pas douze enfants, et ton frère avait 7 ans de moins que toi. Tu avais pourtant pas mal ce que tu voulais, non?

Wilfrid avec la voiture de Luc
Oui. J’étais très gâté. Il a fallu que je me décide moi-même pour aller étudier, pour partir. Les deux premiers jours m’ont paru un mois. La première année, je suis parti de la maison au début de septembre et je suis revenu dans la maison le 23 décembre. Et quand je suis rentré dans la maison, le 23 décembre, je tassais les murs, le passage était trop étroit, le plafond, je le trouvais bas. T’as été 4 mois parti… Papa, lui, il disait : « calisse, j’ai pas été capable d’étudier, et toi tu apprends ce que tu veux, vas-y! Étudie! Fais ce que tu voudras et étudie ». Évidemment, la mère elle s’ennuyait de son petit garçon. Elle en a eu deux, des garçons, mais elle aurait presque voulu en avoir 40. Elle s’est ennuyé, elle s’est ennuyé terriblement, mais c’était difficile de dire « il n’ira pas ». Je suis donc allé, mais la première année, ça a été long. Papa ne savait ni lire ni écrire, il pouvait signer son nom. Maman ne savait quasiment pas écrire non plus. Ils me le disaient. Ils étaient loin de dire « on veut te retenir ». « Tu décides d’aller étudier, alors vas-y ». D’autant plus que c’était cher un peu mais il y avait les possibilités.

La décision de partir n’était quand même pas si évidente que ça.

Non, surtout que je ne connaissais pas un chat qui y allait. Quand je suis arrivé, il y en avait deux.

De Roberval.

Oui. J’en ai revu quelques autres qui étaient plus avancés, que je connaissais comme ça, mais pas intimement. Il y avait Viateur Larouche, et Serge Cossette. Lui, je le connaissais, mais lui, il n’a pas été accepté en Élément A. C’est aussi là que j’ai vu Jean Thibault, par exemple, son père était dentiste à Roberval. Lui, je l’avais connu un peu avant, quand on était à l’école.

C’était comment, d’arriver au séminaire?

JE possède toujorus la valise qu'il avait lors de son entrée
au Séminaire en 1954. Aujourd'hui restaurée,
elle sert de coffre dans sa maison
C’était des dortoirs de 100, des grands dortoirs, la moitié d’une aile, et là-dessus, ils te disent quelle place tu vas avoir. Tu prends l’élévateur, pour monter ta valise jusqu’en haut, puis tu la pousse jusqu’à ton lit. T’as ton lit, puis un petit bureau à côté. Aujourd’hui, j’en ai un pareil dans ma chambre. Tu mets ton linge dedans. Tu as aussi un casier dans la salle de jeu et de récréation intérieure. Tu mets là les choses d’hiver, tes patins, tes hockeys, tes casquettes et tuques, tes bottes…

Et les accessoires d’école?

Tu avais un bureau à l’étude [la salle d’étude], tes livres et tes affaires sont là. T’as un bureau pour toi et il y avait une petite tablette où tu pouvais mettre plus de livres. Tu partais toujours de l’étude pour aller à tes cours. Il y avait quelques dictionnaires et livres que tu pouvais avoir besoin, et ils t’en louaient. Il y avait ce qu’on appelait des « petites bibliothèques » exprès pour louer ce que tu pouvais avoir besoin à ton niveau. Tu payais un petit montant, et quand tu le remettais à la fin, s’il était en ordre, ils te redonnaient le montant.

Le séminaire, il était situé où, à Chicoutimi?

Sur le dessus, en haut de côte de la rue Racine [proche du centre-ville actuel de Chicoutimi].

Cet édifice-là, il existe encore aujourd’hui?

Édifice de l'aile F du Cégep de Chicoutimi, en 2011. Cet
édifice était autrefois le Séminaire de Chicoutimi.
C’est devenu le Cégep de Chicoutimi. Ils ont agrandi, rénové des choses, mais c’est le Cégep de Chicoutimi.

Ce séminaire-là, il n’était pas gratuit, j’imagine.

En inscription, c’était presque négligeable. Ils voulaient surtout qu’il y ait des étudiants qui prennent la relève et deviennent des prêtres à un moment donné, j’imagine. Il y avait environ 300-350 pensionnaires et 300-350 externes, de la région de Jonquière et Chicoutimi, qui voyageaient en autobus. Les frais de scolarité, c’était 450$ ou 480$ par année. Mais là-dessus, tu étais logé et nourri. Les externes, ils avaient juste un petit montant à donner.

Grand-papa, il n’était pas riche, comment il faisait pour payer?

Tu payais par mois. Sur 10 mois, ça faisait 45 piastres par mois. Même qu’il me semble que c’était 40 piastres par mois pour la première année. C’était pas trop pire. D’autant plus qu’ils ne me nourrissaient pas et que j’étais un bon bouffeur à cet âge-là. Alors ça compensait un peu.
--
[13 septembre 2011]

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vos commentaires sont les bienvenus.
Merci de vous identifier. Ce site est un projet privé et n'accepte pas les commentaires anonymes.