jeudi 5 janvier 2012

Quelques rénovations et un accident

Pensionnaire donnant un coup de main?
Luce vient au monde en 1969, au moment où vous avez encore tout ce monde-là dans la maison.

Oui. Il y a eu des tentatives de personnes qui viennent travailler pour aider Gigi dans la maison après qu’elle ait accouché, comme Colette, mais ça n’a pas marché fort. Raymond venait faire les planchers. Les filles, Madeleine et Jeannine, aidaient à faire le ménage, l’époussetage, les choses de même. Louise venait aider aussi un peu. Gisèle a fait des repas quand même assez tôt, mais le reste, un peu tout le monde aidait. On tippait un peu.

L’agrandissement du salon, il s’est fait cet été là? Avant la naissance de Luce?

Louise Paré
Je pourrais pas dire… non en fait, j’ai fait ça pendant les vacances. Ça serait plutôt l’été d’après. J’ai ôté le mur, refait les tuiles de plafond, changé ma plinthe de chauffage, fallait vider les tuyaux, les refaire en-dessous, c’était tous des tuyaux de plomb, je suis devenu habile assez vite. Mais c’est là que ça m’a coûté un œil, aussi. C’est cette fois-là que je me suis brûlé un œil.

En refaisant la plinthe de chauffage?

J’avais refait la plinthe en dessous, j’avais tout ressoudé, tout était bien correct, tout était parfait. Il me restait une soudure à faire, et elle était complètement en haut. J’ai fait ma soudure sans aucun problème, mais en descendant mon fil, j’ai crocheté de quoi; quand je dis le fil, je veux dire l’étain. Quand je l’ai redescendu, j’ai crocheté quelque chose, ça a donné un coup et le bout m’a passé sur l’œil.
Marie-Marthe et Nicole
Je suis allé m’asseoir tranquillement dans mon fauteuil, je me suis accoté doucement, puis je me suis dit que je m’étais brûlé l’œil, mais que ça devrait pas être trop grave. Je me suis accoté un peu et Gisèle m’a dit de lui montrer. J’ai ouvert l’œil pour lui montrer et elle m’a dit d’aller voir le docteur Plante tout de suite. « Il y a une peau sur l’œil, tu es brûlé ». Cet étain-là, quand tu fais de la soudure, il chauffe, et il y a un petit trou et il y a de l’acide là-dedans, en plus. Tu as donc une brûlure à la chaleur et à l’acide. Évidemment, il n’y a pas une quantité industrielle d’acide là-dedans, mais il y en a quand même un peu. Ce qui fait que ça a fait une peau blanche sur l’œil. Je suis allé voir dans le miroir, puis j’ai pris mon auto, mon autre œil était correct, puis je suis parti aller voir le docteur Plante qui était à l’hôpital. Adrien Plante, qui était ophtalmologiste et oto-rhino-laryngologiste, mais il travaillait plus pour les yeux. Quand je suis arrivé, je ne me suis pas occupé des questions d’admission, j’ai filé dans son coin et j’ai ouvert l’œil en disant: je veux voir le docteur. Il a laissé tout le monde de côté et est venu me voir tout de suite.
Luce parmi ses jouets (notez la différence de couleurs
du tapis dans les deux "sections" de salon
Il a regardé mon œil et l’a inspecté sous toutes les coutures, puis il m’a donné des onguents, et il pouvait pas faire autre chose qu’attendre que ça cicatrise. Il m’a donné une prescription pour ces onguents-là, et je suis allé à la pharmacie pour chercher ça et j’ai passé quasiment la semaine dans mon lazyboy. Le problème, avec une brûlure, quand tu mets ta paupière pour faire dodo, ça chauffe, alors au bout d’un quart d’heure, tu pars et tu vas te remettre de l’onguent. Donc, c’était très difficile de dormir. J’essayais de regarder la télévision, et des fois, je m’endormais un peu. J’essayais de regarder le hockey de mon lazyboy, puis là je m’endormais, les yeux me fermaient, mais au bout d’un quart d’heure, je me réveillais, ça faisait mal. C’est comme ça, puis à un moment donné, il y a une petite gale qui est partie. Le docteur Plante, que j’étais allé voir une couple de fois déjà, j’y allais au deux ou trois jours, il a regardé la coupe de l’œil, et comme ça faisait beaucoup moins mal, il me donnait d’autres onguents, et je mettais aussi des goûtes, et là, je pouvais dormir.


En agrandissant le salon, JE allait révéler
la trappe menant au grenier; il allait
couvrir ceci par un ingénieux miroir placé
plafond du salon. Ici, JE et le miroir,
photographié en 2005.
Tu as eu des séquelles à cet œil là ou tu as complètement récupéré?

Ma vue est restée correcte par points, mais il y a des cicatrices dedans. Quand je regarde, ça réfléchit dans la cicatrice, encore à l’heure actuelle, ça a toujours resté marqué. Quelques années plus tard, je suis allé au CHUL à Québec, pour voir une spécialiste, mais il n’y avait rien à faire. Dernièrement, je me suis fait ôter ma lentille, pour mettre une nouvelle lentille, parce que j’avais une cataracte, j’ai posé la question au spécialiste, mais il a dit qu’il ne touchait pas à ça, que le seul moyen serait une greffe de cornée. Fait que je ne touche pas à ça. Ça n’a donc pas changé depuis 50 ans.
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[30 novembre 2011]

Une maisonnée accueillante: Vivre à 9 dans la maison.

JE et Luce (notez les mots croisés, à droite, déjà)
En 1968-1969, les deux années de l‘école normale, vous aviez des pensionnaires. Comment c’était organisé dans la maison, avec deux enfants, et un troisième en route?

Il y avait la chambre du fond, il y en avait deux qui demeuraient là. Et en bas, j’ai fait une chambre, au milieu de la partie du fond, pas comme c’était quand on est parti, mais au milieu. Cette chambre-là avait été faite là parce qu’il y avait déjà un calorifère. Ca permettait de garder une température plus égale. C’était un calorifère qui venait de quand l’église Notre-Dame a brulé, elle a passé au feu, il y avait encore des affaires à récupérer, moi, j’ai ramassé un calorifère, comme j’étais [avec un chauffage] à l’eau chaude.
Hugo et 3 pensionnaires (avec notes de Gigi)
La plomberie, c’est moi qui l’ait fait, c’est tout le temps moi qui faisait mes travaux de plomberie. À partir du moment où la maison a été bâtie. La seule fois où j’ai pas fait la plomberie moi-même, c’est quand j’ai fait changer mon système de chauffage, qui était [avec une fournaise] à l’huile pour l’eau chaude, pour un système [avec une fournaise] électrique, à l’eau chaude.

Donc, vous aviez quatre pensionnaires dans ces deux chambres. Elles ont été là longtemps?

Elles ont été là juste deux ans. Après ça, elles travaillaient. Il y en a une qui enseignait à une place, l’autre ailleurs… Quand je leur enseignais à l’école normale, elles devaient faire des stages. Chacune le faisait généralement dans sa paroisse. Il y en avait d’un peu tout le tour du lac. De l’Ascension, de St-Nazaire, comme Nicole, qui était pensionnaire. Nous on avait Jeanine, Nicole, Marie-Marthe et Madeleine. Il y en avait d’autres qu’on connaissait, qu’on avait logé un peu partout.

Jeanine, Marie-Marthe et Madeleine
Je me souviens de m’être fait raconter que vous aviez aussi eu un autre pensionnaire, le frère de Marie-Marthe?

Oui. C’était drôle. La première chose, c’est que quand j’ai bâti la maison, au bout du foyer, j’avais le mur du salon. J’avais derrière, un petit bureau et une salle de couture. Quand tu arrives avec le plan, t’es sur que tout va être correct, mais quand t’arrives avec ton set de salon, ta télévision, tes bébelles, il me semble que mon salon paraissait plus grand que ça, qu’il est trop petit. Quand j’ai vu ça, j’ai attendu un peu et je me suis décidé, j’ai ôté les deux murs, en mettant la plinthe de chauffage en bas, puis j’ai refini le plafond, avec les tuiles à carreaux, mais avant ça, j’avais commencé par défaire le mur entre la salle de couture et le bureau.
Jeanine et André
André Trudel se cherchait un logement entre temps, et il était le frère de l’une des pensionnaires chez nous. On peut le prendre et la pièce deviendrait sa chambre en attendant. On lui a mis un lit et un petit bureau et il était bien content. Ça le dépannait pendant un bout de temps. C’était pas à long terme. Il travaillait pour la police à Roberval et il venait d’arriver, de l’institut de police, il me semble. On le voyait presque pas, il venait pour souper et coucher.

Ça devait faire beaucoup de monde dans la maison; sept adultes et deux enfants…

Oui, oui. Mais on avait la chambre pour les enfants, le petit set de deux lits que j’avais acheté avant, quand on était à loyer.

Elles trouvaient ça comment, les pensionnaires, d’être hébergée chez le directeur de l’école?

Oh, il y avait à l’école, juste une grosse classe, tout le monde se connaissait. J’étais aussi leur prof de math. J’étais aussi le superviseur de l’enseignement… Aux fêtes, on s’était fait un petit party avant qu’elles partent pour le temps des fêtes, avec un déguisé en Père Noël. C’était amical plus qu’autre chose.
Hélène et Hugo accueillent Luce
Il y en avait même qui ont pensionné chez mes parents, trois gars qui pensionnaient là. Mes parents les avaient pris parce que ça me dépannait pour l’école. Les autres, qui ne pensionnaient pas, étaient de Roberval. [Parmi nos étudiants,] il y avait même le fils d’un député, qui est devenu aussi ministre à son tour, par la suite, Michel Gauthier. Il était là la 2e année, puisqu’on faisait du niveau collégial; on était de l’éducation permanente du collège de Jonquière.
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[30 novembre 2011]

Judo et autres activités

Au début des années 70, tu as fait du Judo. Pourquoi le judo, et combien de temps en as-tu fait?

Megan, Hugo, JE, en 2011
On a commencé [quelques années] après 1967 (*). Quand j’ai fait du judo, c’était avec Pierre Simard, qui était ceinture noire 2e ou 3e dan. C’était un de mes anciens confrères de classe de séminaire, je l’avais connu là. J’ai commencé le judo et ça allait bien, j’aimais ça. Après chaque étape, quand on avait suffisamment d’heures, on pouvait passer une ceinture. J’ai donc passé de la blanche à la jaune, à l’orange, puis la verte et la bleue. Quand j’étais pour passer la ceinture marron, j’avais un problème à un genou et je barrais. J’ai arrêté pour ne pas briser mon genou. Il a été opéré, mais après l’opération, je n’ai pas repris le judo. J’avais donc une ceinture bleue. J’étais presque près pour la ceinture marron, avant la noire, mais j’ai arrêté.

Tu avais d’autres activités avant ça?

Hugo parmi ses jouets
Quand je suis arrivé à Roberval, dans le temps du séminaire des pères maristes, ça arrivait qu’il y ait de cours le soir, et j’avais beaucoup à faire et j’ai pris peu d’activités. Du côté de l’église, il y a eu des changements de liturgie, tout ce qu’il y avait de chants en latin devenaient des chants en français. Je me suis impliqué là-dedans, parce qu’il y en avait pas beaucoup qui était assez baveux pour s’en aller en avant de l’église et faire chanter le monde, parce que c’était pas à la mode. Nous, on l’avait fait quelques fois, en latin, comme dans le temps de Pâques en chantant la passion, avec Benoit Bouchard et son frère Yvan, mais excepté que quand c’est devenu en français, je me suis impliqué là-dedans. Le judo, comme d’ailleurs plus tard la natation, c’est arrivé par la force des choses. Réjean Paré voulait faire du judo, j’en ai fait avec lui. On s’est même organisé des tapis dans le sous-sol, dans la maison chez nous. Je me rappelle pas les années, mais ça jouait au début des années 70, tout ça.
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(*) Un article du journal L'Étoile du Lac daté du 21 janvier 1970 s'intitule "Roberval a son école de Judo". On peut donc présumer que l'ouverture de l'école en question date de cette période.
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[30 novembre 2011]

Relations familiales

Quand t’as connu Gisèle, tu as connu une grosse famille. Tu allais développer des relations proches avec ses frères, mais dans les années 60, ils étaient encore très jeunes.

Louiselle, avec Aline, Cécile, Hugo et Hélène
Richard il n’allait pas à l’école, même pas la maternelle. Je me souviens qu’il se berçait dans sa petite chaise en se faisant jouer de la musique, et il cognait des clous. Donc, comme il a 55 ans, et que ça fait 51 ans que je connais Gisèle, il devait donc avoir autour de 4 ans. Raymond était en maternelle ou première année, il était un petit bonhomme faisant mal un peu alors que Richard était vraiment le bébé. Réjean était pas encore un ado à ce moment-là, mais il était plus vieux un peu. Après ça il y avait huit filles. Louiselle était la plus vieille. Louiselle a été – quand on s’est marié, mais surtout plus tard quand on a eu la maison – elle était contente de faire des tours ou garder les enfants, pour s’éloigner un peu de la famille.
Léonide, Louis, JE et Robert
Yolande était la 3e mais elle était mariée. Elle s’était mariée un peu avant que je connaisse Gisèle, pas longtemps avant mais un peu avant. Thérèse, elle était déjà chez les ursulines à Québec. Je l’ai connu plus tard, quand on est allé à Québec, au parloir. Elle était en arrière d’un grillage, elle était cloitrée, même son père pouvait même pas pratiquement y toucher un doigt. Après ça il y avait Henriette, qui faisait de l’épilepsie. Il fallait toujours un peu surveiller. Après ça c’était Gisèle, puis Laurence, qui était jeune, elle allait encore à l’école quand j’ai connu Gisèle. Plus tard un peu, elle est allé travailler chez F.X. Bouchard, [chez] le père et la mère à Benoit. Il y avait Huguette qui allait à l’école et faisait la fofolle (les Brassard sont allé demeurer en avant de chez eux) avec Claire Brassard, la sœur de Benoit, qui est devenu son mari, à Huguette. Après ça il y avait Colette, qui allait à l’école à ce moment-là, je pense.

C’est donc plus tard que vous avez développé des relations, les gars et toi.

Richard, JE, Raymond
Réjean, il aimait bien ça parler avec le monde, avec des gars. Il était content quand j’ai bâti ma maison en 1967, il est venu donner des coups de mains, m’aider un peu. Puis vers la fin, j’avais plus d’argent pour engager des ouvriers, mais il restait à finir des plafonds un peu, faire de la céramique en avant du foyer, la céramique de la salle de bain, des trucs comme ça. Réjean il venait m’aider et je lui avais dit que je lui donnerais 100 piastres un moment donné, c’était encore un petit gars, qui était encore à l’école. Il m’aidait un peu partout. Quand on a fait la céramique en avant du foyer, on n’en avait jamais fait ni l’un ni l’autre. Donc on a fait la céramique, on l’a posée, très bien posée, aucun problème, y’a juste le fait qu’on l’a lavée un peu en retard, ce qui fait qu’elle est restée avec toutes sortes de petites choses, dedans, du coulis séché, c’est difficile à ôter. Là, on a appris notre leçon comme il faut pour faire la chambre de bain, parce que là, c’était tous les murs et tout le plancher au complet, ça faisait pas mal de céramique à poser. En passant, c’était le père de Robert Auclair [le mari de Yolande] qui me l’avait vendue. Parce qu’il était contracteur, et il en vendait. Il avait eu une ferme, mais il n’en avait plus, il prenait des contrats, il faisait toutes sortes de trucs. J’avais fait venir ma céramique par lui. La céramique en avant du foyer, quand on avait du temps libre, Réjean, avec un tournevis, grattait tranquillement le coulis qui avait de trop!

En 1967, c’est aussi le mariage de ton frère Réjean avec Gaby; qu’est-ce qu’il faisait à 20 ans, comme emploi, quand il s’est marié.

Hélène et JE avec Gaby
Réjean avait suivi des cours de pilotage et il travaillait comme pilote commercial pour Jim Côté. Jim Côté avait des hydravions, et il faisait du transport dans le nord. C’était pas des gros avions, mais dans le temps, il avait sa base à Roberval, et il est aussi allé s’installer à St-Félicien, sur roue. Il allait dans le nord pour livrer des choses. Réjean a travaillé là un peu. C’est là qu’il a commencé à travailler. Après ça, il est allé à Rivière-du-Loup, travailler dans ce coin-là, comme pilote aussi il me semble (*). Après ça, il a été obligé de revenir, et à Roberval, et il a été engagé comme policier. C’était plus tard, mais pas tellement plus tard. Rivière-du-Loup, il était déjà marié quand il est allé là. Ils sont revenus de là et ils ont resté à loyer à côté de chez mes parents. Ils sont resté là un bout de temps.
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(*) Note: À propos du séjour à Rivière-du-Loup, Gaby me précisera un peu après cet entretien: "Nous sommes resté environ 10 mois vers juin 1968 à mars 1969. Réjean pilotait pour du charter avec un avion de St-Félicien mais non [comme] instructeur là-bas, il n'y avait pas d'école de pilotage. Ensuite, les temps morts, il travaillait pour une compagnie qui posait du revêtement de vinyle sur les maisons. Je serais restée là jusqu'à la fin de mes jours".
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[30 novembre 2011]
[19 décembre 2011 pour le commentaire de Gaby]

Politique des années 70 et premières années du Cegep

En 1968, on est en pleine Trudeaumanie… Mais à Roberval, c’est le député créditiste qui l’emporte aux élections fédérales.

Réjean, Cécile, Wilfrid et JE - 25e anniversaire de
mariage de Cécile et Wilfrid
C’était Gauthier de Mistassini, je pense. Il avait un salon funéraire. Les gens avaient de l’intérêt, mais je ne me souviens plus d’une Trudeaumanie. Trudeau était aimé et pas aimé, il y avait des deux.

En 1967, Lévesque quitte le Parti Libéral, puis Daniel Johnson meurt, il y a la création du PQ, puis en 1970, c’est l’élection de Robert Bourassa et c’est un libéral qui est élu dans Roberval. C’est une époque d’effervescence politique. Est-ce qu’on sent ces changements sociaux à Roberval?

Avec Lamontagne, le député Robert Lamontagne, je me souviens surtout d’avoir réussi à avoir un jour [plus tard] obtenu une subvention particulière pour acheter un instrument, une grosse contrebasse, pour l’harmonie de Roberval. Il a été député assez longtemps que quand vous étiez dans l’harmonie, c’est lui qui était député et il m’avait donné la subvention que j’avais demandé. Il s’était impliqué aussi pour aider à ce que ça marche, au Cegep et il s’impliquait aussi dans la commission scolaire, parce qu’on manquait de locaux, et on a eu une école à St-Félicien avant d’avoir le Cegep. On a été là plusieurs années. C’était une petite école, et il y a eu des ajouts en arrière.

C’était situé où à St-Félicien?

Pas tellement loin du Cegep [actuel]. C’était quoi son nom déjà, à cette petite école? Hébert il me semble, mais je ne me rappelle plus.

Elle existe encore aujourd’hui?

Oui, oui. C’était une école primaire, puis nous autres, on a fait faire des ajouts, ils ont mis des genres de grosses roulottes, comme annexes, même le gymnase ça a été une annexe faite pour ce Cegep-là. Le primaire, ils l’avaient mis ailleurs, ils l’avaient refoulé dans les autres écoles. C’était assez grand, mais il fallait faire des laboratoires, le laboratoire de physique, par exemple, c’était une classe au fond. À un moment donné, c’était deux classes, mais tu pouvais mettre un mur pour faire ton cours pendant que le technicien préparait les affaires, puis tu ôtais le mur pour continuer; il y avait quelques tables qui servaient pour le cours et pour le laboratoire en même temps. Ça c’était le laboratoire de physique. Le technicien, Pierre Leboeuf, avait son petit bureau, moi, j’avais mon bureau dans le coin, j’étais tout seul dans ce coin-là aussi. Ça a pris un peu de temps avant qu’ils commencent à construire [le Cegep actuel]. Ils ont pensé d’en faire un, mais il fallait débattre de combien il y aurait de monde. Il fallait analyser la région, c’était surtout Patrice Laroche qui faisait les démarches, Robert Lamontagne était là-dedans, puis le notaire Villeneuve, de Mistassini, qui était président du conseil d’administration, c’était un ancien député aussi ça. Après ça, il y avait le directeur général du secondaire, de la commission scolaire Louis Hémon.

En 1970, pendant que tu enseignes au secondaire, et que tu fais partie du comité de création du Cegep, et juste avant l’ouverture de la polyvalente, c’est aussi la crise d’octobre… De Roberval, ça se vit comment?

Gigi dans sa cuisine - probablement en 1968
Oh, tu regardais ça [à la télé]. Y’avait un certain nombre qui avait des idées de vouloir faire quelque chose, mais ils ont manqué leur coup et ont fait les imbéciles.

C’était compris déjà à l’époque ça? A Roberval, est-ce qu’il y avait des sympathisants du FLQ?

Non. Ça se parlait un peu, des gens qui voulaient que ça soit plus libre [le Québe], mais c’était pas plus qu’il faut, pas moins qu’il faut.

Il y a eu des manifestations?

Oh non, à Roberval, tu étais loin de tout ça. Ce qui se disait, c’était qu’il en y a qui veulent tout changer, mais ils ne réussiront pas, le Saguenay Lac-St-Jean et les autres régions éloignées, qu’est-ce que tu veux qu’ils viennent foutre là-dedans, avant qu’ils réussissent à faire quelque chose? Le FLQ était vu un peu comme ceux qui voulaient de faire un beau nom, mais qu’à un moment donné, ça tourne mal. Arrive l’histoire de l’armée là-dedans, alors là, c’est encore pire. Puis Pierre Laporte est décédé, ils vont trop loin. Pierre Laporte, y’a pas bien bien du monde qui le détestait, c’était un ministre qui était assez aimé un peu partout, alors on dit, allez-y, que veux-tu?

En 1971, c’était ton conventum de rhétorique.

Conventum de Rhétorique 1959-1971
On est allé, je me rappelle pas de tout, on est allé au séminaire, à l’ancien grand séminaire, y’avait Denis Paradis qui demeurait pas loin. Puis on a eu une soirée dans un hôtel à Chicoutimi. Il y en a qu’on n’avait pas revu depuis une dizaine d’années. C’était 59-71, c’est 12 ans. À Philo II, on se réunissait des fois après, mais il y avait pas de trucs officiels, l’habitude, c’était le conventum de rhétorique, c’était ça la tradition. Il y en a qui s’en allait après ça, étudier la philosophie, ou la théologie, qui allaient vers la prêtrise. C’est pour ça que les deux dernières années étaient surtout pour les laïcs, avant, même si dans mon temps, c’était pour tous. Cette tradition-là (conventum de rhétorique) ça datait de loin.
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[9 et 30 novembre 2011]

Un chalet familial

Quand j’étais très jeune, dans le rang 3, vous aviez un chalet, que vous aviez construit avec Grand-Papa. Quand avez-vous commencé ça?

Cécile, Laura, Wilfrid
Papa avait un terrain au 3. Quand on demeurait sur la terre, quand j’étais jeune, lui montait à travers le bois, à travers les champs et à travers le premier rang, il montait jusque-là, et il allait bûcher quelques arbres et s’en revenait. Puis, il a décidé de bâtir un chalet. Le chalet, quand il l’a bâti, je l’ai aidé beaucoup. Au début, il avait commencé juste avec une cabane.

Ça a été construit quand?

Au début, je me demande si j’étais pas encore à loyer (*). Mais après ça, ça s’est surtout fait après la construction de ma maison. Je me souviens que mon grand-père Girard [Adgérie, père de Cécile (*)], qui était pratiquement aveugle, c’est lui qui était venu faire la cheminée du chalet. Il était venu avec nous autres, il ne voyait pas clair, mais je l’avais aidé. Quand tout a été fait, il [Wilfrid] s’est aperçu que le chalet n’était pas sur son terrain. Parce qu’il pensait d’avoir plus grand, d’avoir le demi lot au complet. Ça n’a pas été trop grave, parce que c’était bâti sur le bout des terres qui appartenaient à Petit. Il s’était bâti là parce que c’était plus commode, c’était sur un cran. C’était à dix pas de son terrain, sans le vouloir. Plus tard, j’ai tout fini l’intérieur. C’était pas isolé, mais quand même, je l’ai fini.
Wilfrid, Léonide, Yolande, Louis, Robert
J’avais demandé à mon oncle Philippe, qui était au moulin des Gagnon, pour avoir du V [de la planche en V] et il m’en avait fait pour un bon prix et il était même venu me le livrer. J’avais fini les murs et le plafond en V. Il n’y avait pas d’isolant, mais c’était bien fini. Quand on a fait ça, on avait fait une toilette, et on avait fait des murs pour faire des chambres. On avait rallongé pour faire des chambres. Parce qu’au début, le chalet, c’était juste une cabane [au toit] pointu, il n’y avait pas d’autres pièces. C’est surtout quand on a rallongé, qu’on a fait des chambres, une pour Nenine, une dans le coin, puis deux autres chambres. On avait mis une toilette, qu’on avait organisée avec un gros drum pour ramasser de l’eau dehors quand il mouillait. Dès qu’il mouillait, ça se remplissait et on était correct.

Et la piscine?

Robert, Louis, Richard, Raymond, Yolande
Ça, ça a été une folie. À un moment donné, on s’est dit: il faudrait peut-être se faire une belle petite piscine. Les enfants pourraient nager. C’était mon idée. Papa et Réjean sont venus m’aider. On a fait des formes et après ça, on est allé chercher la compagnie qui livrait du ciment tout préparé. Ils sont venus le livrer et couler la piscine. On a enlevé les formes et plus tard, on s’est organisé jusqu’en bas où on allait chercher notre eau: il y avait une source, à 400 pieds du chalet. On s’est organisé une pompe qui fonctionnait avec le courant de l’eau. Un bélier hydraulique. Donc l’eau coule, ça donne un coup, pouf, pouf, pouf, et ça permettait de pomper de l’eau. L’eau rentrait dedans, et à chaque coup, pouf, l’eau remontait, donc ça faisait monter l’eau jusqu’à notre piscine. Je ne me rappelle pas si c’est le premier ou le deuxième, mais j’en ai fabriqué un. Le bouchon qui tapait était en plomb, pour être bien scellé, et on l’avait coulé avec mon oncle Léonce chez les Gagnon. Après ça, il tapait, tu l’entendais de loin, du chalet, tu le savais quand il marchait. À un moment donné, on était obligé de l’arrêter et de refaire fondre le bouchon. C’était comme un gros bouchon remplit de plomb, mais il se déformait. Rendu trop loin, il restait pris, donc de temps en temps, j’étais obligé de le défaire, de le faire fondre et qu’on le recommence. C’est là qu’on a fini par s’en trouver un traditionnel, et au lieu d’un cap comme on s’était fabriqué, c’était un genre de gros cuir qui faisait le travail, et ça usait pas, donc ça faisait bien. L’eau montait, tu avais pas besoin d’électricité, 400 pieds plus loin, avec une dénivellation d’une bonne vingtaine de pieds, au moins. Quand on a décidé d’en mettre pour la toilette du chalet, on a été capable d’en faire monter aussi. On avait de la très belle eau, c’était de l’eau de source. La source sortait pas très loin d’où on était, ça faisait un beau petit ruisseau, on se servait de ça. La piscine, on la remplissait, mais elle se revidait lentement. Il aurait fallu mettre toutes sortes de choses, et en plus, l’eau était froide et était difficile à réchauffer. Après un moment, on l’a laissé faire, puis on l’a rempli de sable, pour faire un carré de sable.
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(*) Note: La participation du grand-père de JE, Adgérie Girard à la construction de la première phase du chalet permet de dater celle-ci. Adgérie Girard est décédé le 22 novembre 1964, et dans un entretien subséquent, JE mentionnera l'avoir visité à l'hôpital à l'occasion du Nouvel An 1964. À l'été 1963, JE se mariait et faisait son voyage de noces. La construction du chalet est donc antérieure à cette date. Or en 1961, JE étudiait à l'Université Laval pendant l'été. Selon les souvenirs de Gigi, il est probable que le chalet ait été érigé à l'été 1960.
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[30 novembre 2011]

1964-1971: Contexte (3)

Adrien Plante

En plus d'être médecin spécialiste, Adrien Plante a également été conseiller municipal de Roberval de 1951 à 1953, puis maire de Roberval de 1954 à 1957. Un centre d'hébergement porte maintenant son nom à Roberval et la maison dont Adrien Plante était propriétaire est aujourd'hui occupée par le gîte La brise du Lac.

Charles-Arthur Gauthier

Né à Mistassini, Charles-Arthur Gauthier oeuvre 8 ans comme conseiller municipal et deux ans comme maire. Il est aussi demeuré député du Crédit Social du Canada de la circonscription de Roberval pendant 18 ans, de 1962 à 1980. L'élection des libéraux de Trudeau en 1968 n'ont pas permit de le défaire, lui qui en était déjà à sa 4e élection. À deux reprises, il a occupé le poste de chef intérimaire du Crédit Social.

Robert Lamontagne

Robert Lamontagne a occupé le poste de député de Roberval sous la bannière du Parti Libéral du Québec de 1970 à 1981. Il a succédé à Joseph-Georges Gauthier et a été remplacé lors de l'élection de Michel Gauthier.

Joseph-Georges Gauthier

Natif de Chambord, J.-G. Gauthier occupe le poste de maire de 1957 à 1966. Il est élu député de Roberval  sous l'Union Nationale de 1962 à 1970, année d'élection du libéral Robert Lamontagne.

Michel Gauthier

Fils de Joseph-Georges Gauthier, Michel a été élu député de Roberval avec le Parti Québécois en 1981, poste qu'il occupa jusqu'en 1988. Il succédait à Robert Lamontagne.
Quelques années plus tard, Michel Gauthier était élu député fédéral de la circonscription de Roberval-Lac-St-Jean avec le Bloc Québécois, poste qu'il a occupé de 1993 à 2007. Il succédait alors à Benoit Bouchard.
En 1996, il a occupé le poste de chef du Bloc Québécois après le départ de Lucien Bouchard et avant la nomination de Gilles Duceppe.

François-Xavier Bouchard

F.-X. Bouchard a été conseiller municipal de Roberval de 1938 à 1951. Il a ensuite été maire de Roberval de 1960 à 1969. Il était le père de Benoît Bouchard.

Georges Villeneuve

Né à St-Prime, il pratique le notariat à Mistassini après ses études. Il y devient maire de 1961 à 1968. Le notaire Villeneuve a été élu député fédéral avec le Parti Libéral du Canada en 1953. Il succédait à Paul H. Spence. Il est demeuré député jusqu'en 1958.

1964-1971: Contexte (2)

École Hébert (Premier campus du Cegep de St-Félicien)

L'école Hébert fait aujourd'hui partie du réseau scolaire de la Commission Scolaire du Pays des Bleuets. L'école accueille actuellement des élèves de niveaux préscolaires et primaires. Elle est située sur la rue L.W. Leclerc,  à St-Félicien, une rue qui croise le boulevard Hamel non loin d'où est situé le campus actuel du Cégep de St-Félicien. L'école Hébert a servi de premier campus au Cégep lors de sa création en 1971, jusqu'à son déménagement dans le campus actuel, en 1979.

Harmonie de Roberval

Bien qu'elle ait probablement opérée quelques années avant cette date, L'Harmonie de Roberval est officiellement crée en tant qu'organisme en juillet 1975. Elle opère alors sous le nom d'Harmonie Scolaire avant d'adopter le nom d'Harmonie de Roberval en novembre 1978.
Selon les documents historiques, "Les buts de l'Harmonie était d'offrir aux jeunes des cours de musique de formation classique, donner aux jeunes le goût de la vraie musique, combattre la délinquance juvénile et divertir la population.".
À un moment ou un autre, les quatre enfants de JE ont fait partie de l'Harmonie de Roberval.
L'Harmonie a cessé ses activités à la fin des années 80.

Démolition de l'Église Notre-Dame de Roberval

L'église en bois, la plus vieille de toute la région du Saguenay-Lac-St-Jean, construite en 1872-1873, a cédé sa place à l'église moderne de forme pyramidale inaugurée en mars 1967. En mai 1967, l'ancienne église vieille de 95 ans, a été démolie. Qu'il y ait ou non eu un incendie mineur avant cette démolition n'est pas indiqué dans les documents que j'ai retracé. Les articles et livres d'histoire relatent toujours la décision de construire une nouvelle église pour des raisons de modernisme et d'espace, la vieille église étant jugée trop petite. Que la démolition de l'église en bois ait succédé à la construction de la nouvelle église ne fait aucun doute dans les documents historiques, il y a même une photo d'archives où l'on voit les deux églises côtes à côtes, au printemps 1967.
L'été de la démolition, JE entreprenait la construction de sa maison et il a racheté un calorifère à eau chaude de la vieille église quasi centenaire, avant la démolition de celle-ci.

Messe en français et La réforme liturgique du concile Vatican II

Le Concile Vatican II - qui sera considéré comme la plus grande révolution du catholicisme au XXe siècle - est ouvert par Jean XXIII et clos sous Paul VI. Après la promulgation des nouvelles règles concernant la liturgie catholique émises lors du concile, c'est en 1965 que les changements majeurs commencent à être appliqués dans les paroisses du monde.
Alors que dans le cas de la messe chantée, on conserve les chants grégoriens et le latin dans les prières du prêtre, la messe lue garde le latin que pour la préface et la prière eucharistique. La langue parlée peut être admise pour les lectures, pour tous les chants, pour la prière universelle, les acclamations, salutations et dialogues et pour le Notre-Père.
Aussi, la célébration se fait désormais face aux fidèles.
Avec le temps, les quelques éléments latins feront éventuellement place à la langue locale également.
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